Allemagne: le boom de l'emploi dans les énergies vertes est-il un mirage?

Publié le par mes-energies

BERLIN (AFP) - 500.000 emplois créés! Non, un million! Qui dit mieux? Les lobbies de l'énergie renouvelable et le gouvernement allemands promettent un miracle social après l'abandon du nucléaire, là où de nombreux experts voient au mieux un mirage, au pire une tromperie.

 

La chancelière Angela Merkel, interrogée la semaine dernière sur des plans sociaux massifs dans la filière nucléaire allemande, a défendu la "Energiewende", terme rappelant la chute du Mur ("die Wende") et décrivant à la fois l'abandon accéléré du nucléaire et la promotion des énergies vertes.

 

Cette révolution énergétique "créera plus d'emplois qu'elle n'en détruira", promet Mme Merkel.

 

Mais le même jour, l'Allemagne apprenait le premier dépôt de bilan dans le pays d'un fabricant de panneaux solaires, Solon. Quelque 500 emplois sont menacés.

 

Les énergies vertes seront-elles en mesure de contrebalancer les destructions d'emplois qui ont suivi la décision d'abandon accéléré du nucléaire en Allemagne, prise en mars?

 

Depuis que Berlin a décidé de condamner immédiatement huit réacteurs nucléaires et d'éteindre les neuf restants d'ici 2022, les plans sociaux se multiplient.

 

Le numéro un allemand de l'énergie EON veut tailler jusqu'à 11.000 emplois dans le monde, son concurrent RWE va selon la presse en supprimer 8.000, et la restructuration du français Areva va coûter au moins 1.200 emplois à sa filiale allemande.

 

L'abandon de l'énergie nucléaire en Allemagne va selon un calcul de l'université de Stuttgart se traduire par la perte nette à court terme de 185.000 emplois.

 

A ces annonces pessimistes, les opposants au nucléaire en Allemagne répliquent par le potentiel d'embauches des énergies renouvelables.

 

Le lobby (BEE) promet 500.000 emplois, l'institut de recherche économique DIW jusqu'à un million. Le gouvernement table sur 400.000 emplois dans cette branche en 2020, contre 300.000 en 2009.

 

"De la poudre aux yeux", réplique Manuel Frondel, chercheur de l'institut RWI, pour qui il ne s'agit pas de chiffres "nets", d'où auraient été retranchés les emplois perdus en raison du passage aux énergies renouvelables.

 

"Les énergies renouvelables demandent beaucoup de capital mais moins de main d'oeuvre" que les énergies conventionnelles, explique-t-il: il faut des centaines de personnes pour faire tourner une centrale nucléaire ou à charbon, mais très peu de monde pour surveiller un parc éolien ou solaire.

 

M. Frondel dénonce en particulier des "erreurs (politiques) éclatantes dans le secteur de l'énergie solaire".

 

L'installation de panneaux photovoltaïques en Allemagne a bondi ces dernières années, grâce à un système de subventions financé par une surtaxe sur les factures des consommateurs.

 

Mais le phénomène a surtout bénéficié aux panneaux solaires asiatiques, moins chers que les produits fabriqués en Allemagne. Quand ils ne font pas faillite comme Solon, les industriels du pays vont voir ailleurs, ainsi l'entreprise Q-Cells, née en ex-RDA mais qui produit aussi en Malaisie.

 

"Chaque emploi dans le solaire coûte 250.000 euros" aux consommateurs d'électricité or "il s'agit d'emplois condamnés, s'ils ne sont pas déjà perdus", se désole M. Frondel.

 

Par ailleurs, pour certains instituts de recherche, la hausse prévisible du prix de l'électricité en Allemagne va handicaper la croissance et neutraliser au moins à court terme les effets bénéfiques pour l'emploi du passage aux énergies renouvelables.

 

Exemple récent: l'entreprise allemande SGL Carbon a fait savoir qu'elle construirait une usine de fibre de carbone aux Etats-Unis plutôt qu'en Allemagne, parce que l'électricité y est moins chère.

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